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J 33. « La fin de la page 115 »

Samedi 18 avril 2020. Trente-troisième jour de confinement

10ème défi. Fin de la page 115

Dixième défi d’écriture proposé à distance par Carole Lacheray, qui anime l’atelier d’écriture à Trouville-sur-mer. Découvrez son blog (http://osezecrire.blog.free.fr) ou la page Facebook (https://fb.me/osezecrire), puis n’hésitez pas à vous lancer vous aussi, et à partager.

Voici le dixième défi d’écriture. J’espère que vous aurez le temps d’interrompre votre ménage de printemps ou toute autre activité pour y répondre ! 

Le début du dé-confinement pourrait être le 11 mai : le 11ème jour du 5ème mois…Croisons les doigts !

115, pourquoi pas ? Étrange, c’est le numéro du SAMU social : ironie, hasard ?

Allons, mettons un peu de poésie dans ce monde cruel…

Voici ma nouvelle proposition : ouvrez le livre que vous êtes en train de lire (ou un autre !) à la page 115. Repérez la dernière phrase de cette page, vous pouvez n’en choisir qu’une partie.

En tout cas, elle sera le dernier vers du poème que vous allez nous adresser, en prose, en rimes, en alexandrin, tout est permis ! Amusez-vous !

Je suis en train de lire un nouveau recueil de textes pastiches, de Mark Crick : « Cuisiner, bricoler, jardiner avec les grands écrivains ».

La phrase du bas de la page 115 fait partie de la nouvelle « Comment réparer un robinet qui fuit, avec Marguerite Duras » :

« Silence. Elle se tient près de lui, mais ses yeux sont perdus au loin, vers les derniers nuages flamboyants qui disparaissent, un à un, derrière l’horizon ».

Du coup, je ne l’ai joué ni prose ni poésie mais façon roman Nouvelle vague.

Je me suis permis de rajouter un mot après la dernière phrase.

Indifférence

Le temps s’est arrêté. Tout s’est joué un quinze mars. Le dix-sept, pour être précis. Le temps s’est arrêté et les amants sont séparés. À jamais ? Non, peut-être pas, pense-t-elle. Un jour, ils se retrouveront. Un jour, oui. Quand ? Nul ne peut savoir : le temps se moque des hommes. Parfois il s’arrête, parfois il accélère, ou repart en arrière, ou s’immobilise. Elle le sent bien, ce jeu des éléments, seule face à l’océan. Dans sa chair elle le sent aussi, le désespoir des amants séparés. Et devant elle, sur l’horizon, la ronde du soleil, la course de la lune. Indifférents. Ses pleurs au balcon, chaque soir. Les couleurs changeantes de la grande Bleue, la plage blonde et déserte. Indifférentes.

Le temps est revenu. Vraiment. Ou pas tout à fait. Enfin, peut-être, elle ne sait plus. Tout sera autre désormais. Quelque chose a changé. En elle. Dans le monde, sans doute, c’est ce qu’on dit. Il est revenu lui aussi. L’amant. Il l’a prise dans ses bras. Sans un mot. Que lui dire, comment raconter ces journées et ces nuits sans lui. Comment combler l’absence. Ils vont sur la terrasse, face à la mer, qui a toujours été là. Pas un mot. Silence. Elle se tient près de lui, mais ses yeux sont perdus au loin, vers les derniers nuages flamboyants qui disparaissent, un à un, derrière l’horizon. Indifférents.

Isabelle Lebastard